Faute d’arguments face aux questions soulevées par la Parcem, Ndayishimiye s’en prend à la vie privée de son président
Par : Josiane Muzaneza et Digne Karondo
Le président burundais Evariste Ndayishimiye s’en est pris à Faustin Ndikumana, président de Parole et Actions pour le Réveil des Consciences et l’Évolution des Mentalités (PARCEM), suite aux analyses présentées par l’activiste sur la gestion économique du pays à Kayanza le 5 novembre.
Le 31 octobre 2025, parcem avait organisé une conférence de presse pour présenter son analyse intitulée « leadership politique et développement économique ». Parmi les points abordés figurait la question du carburant, un problème persistant depuis plusieurs années. Le président de l’organisation a signalé des incohérences dans l’approvisionnement : « tantôt on nous dit que le carburant est stocké à Dar-Es-Salaam mais qu’il n’y a pas de camions-citernes. Tantôt on nous dit que le carburant a été détourné dans les stocks de la sopebu, mais personne n’est inquiété. Dernièrement, on nous a dit que le carburant était arrivé en grande quantité mais que les propriétaires des stations l’ont boycotté. Si c’était vrai, pourquoi continuent-ils à desservir les clients par plaques d’immatriculation ? » a-t-il déclaré. Le président de parcem a également évoqué la gestion des engrais chimiques, subventionnés à plus de 300 milliards, mais toujours indisponibles.
Après une semaine, le président Ndayishimiye a répondu en critiquant personnellement Faustin Ndikumana. Selon lui, les critiques de l’activiste sont infondées. « il se contente de signaler le manque de carburant. Mais il roule toujours dans sa voiture. Avec quel argent a-t-il acheté sa voiture s’il n’a aucun travail régulier ? Si ce n’est pas un voleur, il roule pour les colonisateurs, sinon il souffrirait de malnutrition. Il porte de belles chaussures et des costumes. D’où vient cet argent ? » a-t-il déclaré.
Parcem a exprimé son point de vue sur l’utilisation des ressources de l’État, alors que le pays fait face à des défis économiques. Le président de l’organisation a observé que certaines infrastructures publiques se détériorent, notamment l’aéroport national, et que les fonds destinés au développement sont parfois mobilisés pour d’autres usages.
Lors de son allocution, le président a également évoqué la situation personnelle de Faustin Ndikumana, soulignant qu’il était célibataire et jugeant qu’il n’avait pas l’expérience pour commenter certains aspects de la gestion des besoins de la population. « il est sous l’emprise des démons Sanballat et Tobia. S’il fondait un foyer, il constaterait la difficulté de rationner pour sa famille. Lui, lorsqu’il consomme des bananes et des brochettes et boit quelques bières, il n’a pas de charges familiales », a-t-il déclaré.
Le président a poursuivi en questionnant l’âge et l’expérience de ses critiques. Ce n’est pas la première fois que des activistes de la société civile font l’objet de commentaires du chef de l’État. En octobre dernier, Pacifique Nininahazwe, président du Focode, avait également été critiqué après avoir évoqué la situation alimentaire de la population.
La Ligue Iteka dénonce les menaces du président contre les défenseurs des droits humains
La Ligue Iteka se dit profondément préoccupée par les propos du président burundais Évariste Ndayishimiye, perçus comme des appels déguisés au lynchage des défenseurs des droits humains. Hier, Pacifique Nininahazwe, président du FOCODE, a été ciblé, et aujourd’hui, c’est Faustin Ndikumana, président de Parcem, qui est exposé.
Selon l’organisation, des publications d’une équipe du pouvoir sur les réseaux sociaux prétendent que Faustin Ndikumana ne serait arrivé dans le pays que récemment, alors qu’il y vit depuis 2015, illustrant le danger auquel il fait face.
La Ligue Iteka interpelle les partenaires du Burundi, notamment l’Union européenne et les missions diplomatiques accréditées, pour discuter avec la présidence des mesures à prendre afin de protéger les défenseurs des droits humains, en particulier Faustin Ndikumana.
L’organisation rappelle que Faustin Ndikumana devrait bénéficier d’une protection spéciale en raison de son rôle dans la société burundaise. Elle met en garde le président Ndayishimiye, soulignant que la justice ne restera pas muette face à des actes contraires à sa mission et que la responsabilité du chef de l’État est engagée face aux violences contre les défenseurs et aux exactions quotidiennes qui affectent les Burundais.

