La dette intérieure du Burundi est presque passée du simple au triple sur une période de 5 ans. Selon les experts du domaine de l’Economie, cette croissance rapide et continue de l’endettement publique du Burundi trouverait principalement ses origines dans la crise politico-économique qu’endure le Burundi depuis 2015.
Depuis la décision prise par feu le Président Pierre Nkurunziza de briguer un troisième mandat anticonstitutionnel en 2015, l’économie nationale s’est progressivement et sensiblement détériorée. Selon les informations d’un des experts dans le domaine qui s’est entretenu avec la RPA, cette situation a provoqué l’accentuation de l’endettement public, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays.
Se basant sur le rapport annuel de la Banque de la République du Burundi de l’année 2020, l’économiste Faustin Ndikumana fait savoir que la dette intérieure de l’Etat du Burundi a quasiment triplé depuis 2015. ‘‘L’augmentation exponentielle de l’endettement s’est fait observer surtout à partir de 2015. Par exemple l’endettement intérieur tournait autour de 1000 milliards de francs burundais, mais en 2020 il était à 2700 milliards. Cela veut dire qu’il a été multiplié presque par trois en 5 ans. On voit vraiment une nette augmentation dans une courte durée. Cette situation est peut-être liée à cette crise politico-économique dans laquelle le Burundi est plongé ‘’, a-t- il expliqué l’économiste.
Selon toujours cet expert, quoique la dette extérieure n’a pas suivi le même train que celle intérieure, elle n’a pas non plus cessé de s’accroitre. ‘’ L’endettement extérieur tournait autour de 700 et 800 milliards en 2015. Maintenant, il est à 1000 milliards. Le niveau de la dette extérieure a beaucoup augmenté ‘’.
Différents spécialistes de la macro-économie et ceux de la Banque centrale qui se sont entretenus avec la RPA, expliquent que l’accroissement de la dette intérieure est consécutif à la suspension de l’aide financière après les sanctions prises contre le Burundi. Ces experts soulignent donc qu’en guise de solution facilement accessible, l’Etat préfère alors orienter ses engagements vers les banques commerciales du Burundi.
L’U.A réclame à son tour des arriérés à Gitega
Le Burundi doit à la commission de l’Union Africaine un montant de près de 2 million et demi de dollars américains de contribution. Parmi les cotisations dont le Burundi ne s’est pas encore acquittées au sein de cette institution africaine, figure également la contribution pour l’année en cours. Dans sa correspondance du 8 juin 2021 à l’ambassadeur de la République du Burundi, cette commission a tenu à rappeler que la contribution statutaire des Etats membres doit être versée le 1er janvier de chaque année.
En effet, ces contributions sont de deux sortes, à savoir la contribution sur le budget ordinaire et la contribution sur le fond de la paix. Comme cotisation pour l’année 2021, la République du Burundi devrait avoir versé 836.385 dollars américains au titre du budget ordinaire 2021 et 210.638 dollars de contribution sur fonds de la paix 2021. A cela s’ajoute encore 1.371.157 de dollars américains en condensant les arriérés sur le budget ordinaire et sur le fond de la paix.
Enfin de compte, le Burundi est redevable de 2.418.180 de dollars américains. Aux termes de ladite correspondance, la commission de l’Union Africaine demande au gouvernement du Burundi de prendre toutes les mesures nécessaires pour régler ce montant.
La levée des sanctions à l’encontre du Burundi ne pourrait pas combler son déficit.
Le Burundi se trouve actuellement dans une incapacité de rembourser de manière effective sa dette publique. André Nikwigize a expliqué que les indices susceptibles de permettre au gouvernement burundais de sortir de ce gouffre sont terriblement maigres. ‘‘ Le problème crucial n’est pas le montant de la dette car tous les pays du monde s’endettent. C’est plutôt comment cette dette sera remboursée. La dette est normalement remboursée par la production nationale. Pour le cas du Burundi, le Produit Intérieur Brut s’élevait à 371 dollars américains par habitant en 1990. Aujourd’hui, ce niveau a baissé jusqu’à 202 dollars américains par habitant. Cela signifie que le citoyen burundais est plus pauvre qu’il y a 30 ans’’, a argumenté l’économiste au cours d’une interview exclusive accordée à la RPA.
L’expert en Economie André Nikwigize a indiqué que la situation économique du Burundi s’est empirée après la suspension des concours que les principaux partenaires de développement prêtaient à ce pays. ‘‘Aujourd’hui, la dette publique représente plus de 52% du PIB alors que le Fonds Monétaire Internationale recommande de ne pas dépasser 35%’’.S’alarme cet expert burundais.
Et ce spécialiste de révéler que l’arrêt des sanctions contre le Burundi ne restaurera pas la crédibilité du pays aux yeux des bailleurs de fonds internationaux. ‘‘ Mis à part l’allègement d’environ 7,6 millions de dollars de la dette consécutif aux effets de la Covid-19, le FMI a déjà retenu que le Burundi n’est pas éligible pour de nouveaux emprunts. De plus, sur base des recettes d’exportation des biens et services, le Burundi ne consacre que 5% au remboursement du service de la dette au moment où le FMI recommande un minimum de 10 %. Cela veut dire que les exportations du Burundi sont faibles et ne pourront pas rembourser la dette extérieure’’, a déduit André Nikwigize.
L’expert André Nikwigize en conclut que si le gouvernement du Burundi n’élabore pas des stratégies pour améliorer la production nationale, la situation économique continuera à être plutôt catastrophique. Afin d’éviter le pire, André Nikwize suggère au gouvernement du Burundi la rationalisation des ressources intérieures, la chasse aux ressources détournées par les responsables publiques, l’affectation de ces moyens financiers au développement national ainsi que la négociation des dons au lieu d’accumuler des prêts.